Cet ancien footballeur aide les autres à se reconstruire en jardinant

Tayshan Hayden-Smith a grandi dans un logement social à Londres. Le petit jardin familial est devenu son aire de jeu et un tremplin pour sa future carrière de footballeur. Après l’incendie de la tour Grenfell qui a dévasté sa communauté en 2017, il est retourné sur les lieux et a contribué à réhabiliter les parcelles urbaines en espaces verts. Il a aussi fondé Grow to Know pour rendre la nature accessible à une nouvelle génération de jardiniers marquée par une plus grande diversité. « Dans un jardin, les frontières s’effacent », note le sportif, qui continue de reverdir les quartiers défavorisés.
Lorsqu’Hayden-Smith est revenu s’installer à Londres, il a voulu apporter du réconfort à son ancien quartier de North Kensington, et a puisé son inspiration dans le jardin de sa mère. Une autoroute surélevée, appelée la Westway, traverse la communauté, et c’est en dessous, dans un espace où se croisaient artistes de rue et personnes sans abri, qu’Hayden-Smith a découvert un lopin de terre jonché de détritus.
Il a commencé à le nettoyer et à y planter des graines. « C’était un jardin prêt à éclore », dit-il. « Juste une toile vierge avec de la terre. » Des pépinières locales ont offert des plantes, des géraniums en abondance, et même quelques palmiers. Un habitant a décidé de cultiver des ignames. Pour un quartier traumatisé par la catastrophe, ce petit coin de terre sous l’autoroute est devenu un symbole de renaissance. Hayden-Smith et ses amis l’ont nommé le Grenfell Garden of Peace : le Jardin de la Paix de Grenfell.
Rapidement, ils transforment cinq autres terrains en friche en jardins publics, et Hayden-Smith a pris conscience qu’il était devenu un militant. D’autres ont voulu se joindre à sa cause. En 2020, il a lancé une association à but non lucratif appelée Grow to Know, et a réuni autour de lui plusieurs collaborateurs, dont Danny Clarke, horticulteur britannico-jamaïcain et animateur de l’émission de la BBC The Instant Gardener, ainsi qu’Ali Yellop, agriculteur basé à Londres. L’association reste engagée dans l’ouverture des espaces verts aux personnes marginalisées et dans la formation d’une nouvelle génération, diverse, d’activistes du plein air.
« J’ai deux jeunes enfants », confie Hayden-Smith. « Et je me suis dit : et si tu n’as pas le temps de jardiner ? Et si tu n’as pas les moyens ? Tu exclues tout un pan de la population qui n’a pas accès à ces ressources. »
Dans le même temps, sa mission s’est élargie de manière holistique pour « rechercher la joie et la justice », dit-il. Ses objectifs incluent désormais l’autonomisation des mouvements de base qui luttent contre les inégalités tout en renforçant les communautés locales, ainsi que le plaidoyer en faveur de politiques publiques visant à protéger les habitants. Certains projets de Grow to Know mettent l’accent sur l’histoire raciale et environnementale, comme leur participation au Chelsea Flower Show de la Royal Horticultural Society en 2022. Leur installation s’inspirait d’un restaurant caribéen aujourd’hui fermé, le Mangrove, situé à North Kensington, et des neuf militants noirs qui furent jugés en 1970 pour incitation à l’émeute après avoir protesté contre le harcèlement policier autour de l’établissement. Le projet, intitulé Hands Off Mangrove, mettait aussi en lumière la disparition des forêts de mangroves à travers le monde.
D’autres initiatives sont davantage portées par l’ambiance et le ressenti : en mars dernier, Grow to Know a collaboré avec Gucci, réutilisant 10 000 fougères et arbustes d’un défilé de mode sur le thème de la forêt organisé au Tate Modern pour créer un jardin communautaire à proximité. « Il faut s’appuyer sur ce qui attire déjà les jeunes », explique Hayden-Smith. « Si Nike lançait une campagne où les cent premiers participants reçoivent des crampons de foot, je serais le premier sur place. Comment créer ce même engouement autour de la nature, des fleurs, du jardinage et de la sécurité alimentaire ? »
Pour Hayden-Smith, il y a une raison profonde à ce lien avec les plantes. « Dans un jardin », dit-il, « les barrières tombent. »
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