Découvrez les premières observations du nouveau télescope terrestre géant

Juin 24, 2025 - 14:20
Découvrez les premières observations du nouveau télescope terrestre géant

Perché haut dans les contreforts des montagnes de la cordillère des Andes au Chili, un nouveau télescope spatial révolutionnaire vient de capturer ses premiers clichés du cosmos. Et ils sont spectaculaires.

Les astronomes ont des étoiles plein les yeux de ces premières images publiées par l’observatoire Vera C. Rubin, qui montrent l’Univers dans ses moindres détails : des collisions cosmiques violentes aux nébuleuses éloignées. Du jamais vu.

« Il s’agit vraiment d’un bon instrument. Sa profondeur et son large champ de vision nous permettent de capturer de très belles images des étoiles, surtout des étoiles qui sont moins lumineuses », explique Christian Aganze, archéologue galactique de l’université de Stanford, qui utilise les données de l’observatoire pour étudier la formation et l’évolution de la Voie lactée. « Nous entrons à présent dans une nouvelle ère. »

L’observatoire embarque quelques composants importants, comme un télescope géant, le télescope d’études Simonyi, connecté au plus grand appareil photo au monde, à la meilleure résolution numérique de la planète. Le miroir primaire de l’observatoire, de 8,4 mètres de diamètre, couplé à un appareil photo à la résolution délirant de 3 200 mégapixels, capture de manière répétée des images avec une durée d’exposition de 30 secondes de vastes parties du ciel avec une vitesse et des détails sans nul pareil. Chaque image couvre une partie du ciel aussi grande que quarante pleines lunes.

Toutes les trois nuits au cours des dix prochaines années, l’observatoire Vera C. Rubin produira une nouvelle carte ultra-haute définition de toute la partie sud du ciel visible. Avec autant de couverture, les scientifiques espèrent créer un « film », à jour et détaillé, qu’ils pourront utiliser pour observer les changements du cosmos au fil du temps.

« Parce que nous prenons des photos du ciel nocturne si vite et si souvent, nous détecterons des millions d’objets changeant toutes les nuits. Nous combinerons également ces images pour être en mesure d’apercevoir des galaxies et des étoiles quasiment invisibles tant leur lumière est faible, y compris des galaxies à des milliards d’années-lumière de nous », se réjouit Aaron Roodman au cours d’une conférence de presse, en juin. Il dirige le programme de l’appareil LSST (Large Synoptic Survey Telescope, grand télescope d’étude synoptique) de l’observatoire Vera C. Rubin et est le directeur adjoint de la construction de l’observatoire.

« Cela a été incroyablement exaltant de voir l’observatoire Rubin commencer à capturer des clichés. Cela va nous permettre d’explorer des galaxies, des étoiles de la Voie lactée, des corps célestes du système solaire, tout ceci d’une toute nouvelle manière. »

 

DES GALAXIES À PERTE DE VUE

La première série d’images prises grâce à l’appareil photo numérique conçu à cet effet, dévoile l’Univers avec des détails époustouflants. Les chercheurs ont combiné sept heures d’observation en une seule image qui capture les anciennes lumières diffusées par la nébuleuse de la Lagune et la nébuleuse Trifide. Ces vastes nuages de gaz et de poussière interstellaires sont respectivement situés à 4 350 et 4 000 années-lumière de nous.

Deux autres photos montrent la vue du télescope de l’amas de la Vierge, un mélange de presque 2 000 galaxies elliptiques et spirales. Des étoiles scintillantes de notre voisinage cosmique brillent parmi les systèmes tentaculaires d’étoiles, de gaz et de poussière maintenus par la gravité.

Les images de l’amas de la Vierge capturées par l’observatoire montrent également le ballet chaotique de la fusion de galaxies, un procédé qui joue un rôle crucial dans l’évolution des galaxies.

« Les images de l’amas de la Vierge sont à couper le souffle », s’émerveille Christian Aganze. « Le niveau de détails, de la fusion de galaxies à large échelle aux détails de la structure en spirale des galaxies individuelles, des galaxies encore plus éloignées en toile de fond, des étoiles de la Voie lactée au premier plan, le tout en une seule image, c’est révolutionnaire ! »

Les premières images montrées au public, ajoute Aaron Roodman, « sont un avant-goût du potentiel de découverte de Rubin ».

Au cours de la prochaine décennie, l’observatoire photographiera des millions de corps célestes par jour, c’est-à-dire plus d’une centaine chaque seconde. En fin de compte, on s’attend à découvrir 17 milliards d’étoiles et 20 milliards de galaxies que l’on n’a encore jamais vues.

À LA RECHERCHE DE LA MATIÈRE NOIRE

Le concept pour ce projet a été conçu il y a environ trente ans afin de maximiser l’étude des questions encore en suspens de l’astronomie grâce à une instrumentalisation de pointe. La construction a commencé en 2014 à Cerro Pachón au Chili, à une altitude de 2 673 mètres. Il portait à l’origine le nom de grand télescope d’étude synoptique et a été renommé en 2019 en hommage à l’astronome américaine Vera C. Rubin, dont les travaux ont fourni la première preuve par observation de la matière noire

Lorsque l’observatoire commencera sérieusement ses opérations scientifiques plus tard en 2025, ses instruments délivreront un déluge de données astronomiques qui sera trop important pour être traité manuellement. Chaque nuit, l’observatoire génèrera près de 20 téraoctets de données. Des algorithmes informatiques passeront donc au peigne fin ces immenses volumes de données pour aider les chercheurs à repérer tout schéma ou événement rare dans une zone précise du ciel au cours du temps.

Les astronomes s’attendent à ce que les observations de haute qualité récoltées par le télescope aideront à cartographier la structure de l’Univers, à trouver des comètes et des astéroïdes potentiellement dangereux dans notre système solaire et à détecter des explosions d’étoiles et des trous noirs dans des galaxies éloignées.

L’observatoire sera également en charge d’examiner les contreparties optiques des événements d’onde gravitationnelle, des ricochets dans la trame de l’espace, causés par certains des processus les plus énergétiques du cosmos. En étudiant ces événements, les astronomes espèrent découvrir les secrets de ces forces invisibles qui façonnent l’univers, comme la matière noire et l’énergie sombre.

« Ces quelques premières images montrent vraiment l’aboutissement de ces dix années de travail acharné et méticuleux de la part de toute l’équipe, de la conception et la simulation, à l’assemblement, la caractérisation et le calibrage de chacune des parties de l’observatoire : télescope, appareil photo, pipeline de données, rien n’a été laissé au hasard », explique Sandrine Thomas au cours d’une conférence de presse en juin, directrice adjointe de l’observatoire Rubin et la scientifique du site et du télescope de l’observatoire.

« C’est pour moi un privilège d’avoir pu travailler avec une équipe aussi dévouée et talentueuse venant des quatre coins de la planète », conclut-elle. « C’est vraiment impressionnant. »