Qu’est-ce qu’un dôme de chaleur, ce phénomène qui frappe actuellement les États-Unis ?

L’été est officiellement là. Et il démarre sur les chapeaux de roue aux États-Unis, où le centre et l’est du pays sont touchés par un dôme de chaleur extrême.
« La puissante crête barométrique de niveau supérieur installée sur la moitié est du pays continuera à générer une vague de chaleur extrêmement dangereuse cette semaine », met en garde le National Weather Service de la National Oceanic and Atmospheric Administration (service météorologique de l’Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique).
Des températures dépassant les 40°C, qui devraient battre des records, sont attendues. La nuit, le mercure sera compris entre 21 et 26°C, offrant un peu de répit. Mais l’humidité accroît la menace, avec des indices de chaleur atteignant près de 46°C dans certaines zones.
Qu’est-ce qui cause les dômes de chaleur ? En quoi le changement climatique pourrait-il jouer un rôle ? Quels gestes adopter pour se protéger de la chaleur extrême ?
QU’EST-CE QU’UN DÔME DE CHALEUR ?
Un dôme de chaleur est un phénomène météorologique survenant lorsqu’une grande zone de haute pression dans l’atmosphère forme une crête au-dessus d’une région et y reste pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines.
« Ce “dôme” s’apparente à un couvercle. Il empêche la chaleur de s’échapper et bloque la formation des nuages, ce qui entraîne des températures continuellement élevées et peu de répit », explique Brandon Buckingham, météorologue chez AccuWeather.
Lorsque l’air chaud tente de monter, il se retrouve bloqué par la crête de haute pression. En s’affaissant, il se compresse et devient encore plus chaud, créant ainsi des conditions de chaleur extrême en surface sur des zones de plusieurs centaines de kilomètres.
Ces pics de chaleur accablante n’ont rien de nouveau. Mais le terme « dôme de chaleur », qui n’est pas un terme scientifique officiel, est très utilisé depuis quelques années pour décrire ce phénomène.
QU’EST-CE QUI CAUSE LES DÔMES DE CHALEUR ?
Des conditions météorologiques spécifiques doivent être réunies pour créer un dôme de chaleur, contrairement aux vagues de chaleur qui résultent de divers facteurs.
Un dôme de chaleur est généralement dû à un changement survenu au niveau des régimes atmosphériques. Lorsque ces régimes perturbent le flux du courant-jet, cette rivière aérienne faite de vents puissants et rapides qui ondule autour du continent d’ouest en est, certaines régions peuvent être touchées par des phénomènes climatiques extrêmes, comme des vagues de chaleur, des inondations, des vagues de froid, des tempêtes et des sècheresses. Quand les axes nord et sud du courant-jet deviennent trop grands, ils ralentissent ou stagnent, ce qui paralyse le système de haute pression qui formera par la suite la partie supérieure du dôme de chaleur.
Les régimes climatiques océaniques, dont la Niña, peuvent contribuer à poser les bases d’un dôme de chaleur lorsque des températures de surface de la mer plus chaudes que d’ordinaire altèrent ces courants d’air.
Le système de haute pression empêche l’air chaud de monter, réprimant la formation des nuages et créant des conditions météorologiques sèches et ensoleillées durables. Plus le rayonnement solaire atteint à la surface, plus la chaleur augmente dans le dôme.
COMMENT SE DÉPLACENT LES DÔMES DE CHALEUR ?
Malheureusement pour les personnes concernées, les dômes de chaleur ont tendance à stagner ou à se déplacer lentement, s’étendant sur de larges zones. Ce sont les régimes de circulation atmosphériques, et plus particulièrement le courant-jet, qui déterminent généralement leur trajectoire et leur durée.
« La position du courant-jet détermine souvent la durée pendant laquelle une région va être touchée par un dôme de chaleur et si de l’air plus frais provenant de latitudes plus élevées peut s’installer », explique Brandon Buckingham. « Lorsque le courant-jet se décale ou faiblit, le dôme peut s’élargir ou s’installer dans de nouvelles zones. Ce n’est que lorsque la crête de haute pression s’affaisse, entraînant la dissipation rapide du dôme, que les températures diminuent enfin ».
LE CHANGEMENT CLIMATIQUE A-T-IL UNE INCIDENCE ?
D’après le rapport de synthèse du bilan 2023 des changements climatiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, « il est quasiment certain que les pics de chaleur extrêmes (y compris les vagues de chaleur) sont devenus plus fréquents et plus intenses dans la plupart des régions terrestres depuis les années 1950 ».
Les dômes de chaleur font partie de ces pics de chaleur extrêmes. Les températures océaniques et terrestres plus chaudes fournissent une base de référence plus élevée, ce qui amplifie les effets de réchauffement des dômes de chaleur. Aussi, une baisse de l’évaporation à l’effet rafraîchissant peut se produire à mesure que le sol perd en humidité avec la chaleur et la sècheresse.
Le changement climatique peut aussi altérer les comportements du courant-jet qui contribuent aux dômes de chaleur. « Les changements de circulation atmosphérique, qui sont associés au réchauffement de l’Arctique, peuvent rendre les régimes climatiques plus stagnants, ce qui permet aux dômes de chaleur de perdurer », décrit Ashley Ward, directrice du Heat Policy Innovation Hub à l’université de Duke.
En plus d’être plus fréquents, les dômes de chaleur durent également plus longtemps. Certains, à l’instar de la vague de chaleur qui a touché le Nord-Ouest Pacifique de l’Amérique du Nord en 2021, ont battu tous les records, à tel point qu’ils transforment la compréhension des pics de chaleur extrême des scientifiques dans un monde en évolution.
QUELS SONT LES EFFETS DE LA CHALEUR ET DE L’HUMIDITÉ SUR L’ORGANISME ?
La chaleur et la moiteur qui règnent sous un dôme de chaleur sont plus qu’inconfortables.
« La chaleur et l’humidité posent à eux deux de graves risques pour la santé », confie Mostafijur Rahman de l’université Tulane, qui étudie les effets des phénomènes météorologiques extrêmes sur la santé humaine.
Ces conditions étouffent le système de refroidissement primaire de l’organisme, à savoir la transpiration. Le corps se refroidit lorsque la transpiration s’évapore de la peau, mais cette évaporation est moins efficace lorsque le taux d’humidité dans l’air est élevé, ce qui fait augmenter la température corporelle.
« Ceci peut causer de la déshydratation, des coups de chaleur et des insolations potentiellement mortelles », poursuit Mostafijur Rahman. « Les risques pour la santé sont particulièrement élevés chez les personnes âgées, les enfants, les personnes souffrant de maladies chroniques et celles travaillant en extérieur ».
COMMENT SE RAFRAÎCHIR ?
Selon l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis, les pics de chaleur extrêmes sont responsables de plus de 1 300 décès par an dans le pays. Pour vous protéger, il est important de bien vous hydrater, d’éviter les activités en plein air au plus chaud de la journée et de chercher des endroits frais.
Pour vous rafraîchir, vous pouvez utiliser des ventilateurs, prendre des douches froides et immergez vos pieds et vos chevilles, ou vos bras jusqu’aux coudes, dans l’eau froide. Une autre méthode efficace pour faire baisser votre température corporelle consiste à se passer un gant de toilette frais sur la peau devant un ventilateur.
« Lorsque les températures extérieures atteignent un certain niveau, la seule façon de se protéger est de rechercher la climatisation », souligne Ashley Ward.
Cette dernière recommande, si vous n’avez pas la climatisation chez vous, d’élaborer un plan d’action contre la chaleur, qui consiste à localiser les centres de fraîcheur et à noter leurs horaires. Vous pouvez aussi vous rendre dans des lieux climatisés, comme les centres commerciaux ou chez des amis, où vous pourrez trouver un peu de répit.
« Le plus important est de faire attention [à votre corps] », souligne Ashley Ward. « Demandez immédiatement de l’aide si vous présentez des signes d’insolation et prenez des nouvelles de vos proches, amis et voisins vulnérables ».