Afghanistan : la vie sous le régime des talibans

Oct 22, 2025 - 17:00
Afghanistan : la vie sous le régime des talibans

Lorsque le photographe iranien Hashem Shakeri est retourné à Kaboul en août 2022, cela faisait un peu moins d’un an qu’il avait visité pour la première fois la capitale afghane. C’était également moins d’un an après le retour au pouvoir des talibans, eux qui en avaient été chassés vingt ans auparavant à la suite d’une invasion conduite par les États-Unis. Il s’est alors trouvé dans un pays très différent. « J’ai été profondément troublé par l’ampleur de cette noirceur, l’incertitude et le renversement de tout », se rappelle-t-il.

Le projet du photographe, justement baptisé « Staring into the Abyss » (Au bord du gouffre) est une collection de clichés profondément émouvants, qui saisissent la lente désintégration des rêves engendrée par l’effondrement rapide de la société. L’Afghanistan est, à bien des égards, un pays qui ressemble au sien. Hashem a grandi en Iran, un pays qui partage une histoire et une culture avec l’Afghanistan, ainsi qu’une langue commune, ce qui lui a permis d’acquérir une perspective unique une perspective unique sur le nouveau régime et la manière dont son instauration a affecté les classes complexes et interconnectées de la société.

« Tout ce pour quoi le peuple [afghan] s’est battu a été soudainement effacé. Il est revenu à la case de départ, voire pire », observe Hashem Shakeri.

Les clichés du photographe témoignent de cette perte, visible aux quatre coins d’un Afghanistan submergé par la pauvreté, le chômage et la famine. Ils visent aussi à mettre en avant les histoires d’individus, en particulier les femmes et les membres des groupes marginalisés, qui ont perdu leurs droits et leurs libertés alors que les talibans utilisaient leur identité même contre eux.

Le résultat, comme illustré dans les photographies d’Hashem Shakeri, est un pays en apparence figé dans le temps, dont la population vit dans un espace liminaire entre ce qu’il était et ce qu’il aurait pu devenir. « C’est comme un trou noir d’ignorance qui a absorbé toute la lumière et la retient, sans que l’on sache s’il va un jour cesser de la dévorer », analyse le photographe tandis qu’il décrit le gouffre dans lequel se trouve désormais l’Afghanistan contrôlé par les talibans.

Hashem Shakeri espère que ses clichés susciteront l’empathie en humanisant des communautés qui ont survécu à des années de conflits, d’invasions, de colonisation et de fondamentalisme. « Lorsque le public prend conscience de la vie et des personnalités des gens, il ne les voit plus comme de sombres “étrangers”. Il reconnaît leur humanité partagée », confie-t-il.

Les noms marqués d’un astérisque dans les légendes ont été changés pour des raisons de sécurité. Les âges mentionnés sont ceux des personnes au moment où elles ont été photographiées.