Retraite politique de Laurent Gbagbo : réaction de Cissé Bacongo

Oct 23, 2025 - 16:40
Oct 23, 2025 - 20:47
Retraite politique de Laurent Gbagbo : réaction de Cissé Bacongo

Une grande figure de la scène politique ivoirienne, Laurent Gbagbo, annonce sa retraite. Cissé Bacongo, secrétaire exécutif du RHDP, s’est réjoui de cette décision d’une façon particulière.

Quand Cissé Bacongo digère mal la retraite annoncée de Laurent Gbagbo

Depuis les années 1980, le Président Laurent Gbagbo a été à la tête des luttes politiques en Côte d’Ivoire. Fondateur du FPI, il est le père du multipartisme ivoirien. L’opposant historique à feu Félix Houphouët-Boigny s’est ensuite fait élire Président en 2000 face au Général Robert Guéï. Deux années après son ascension à la tête du pays, il sera victime de nombreuses tentatives de coups d’État, dont celle du 19 septembre 2002 devenue une rébellion armée, violente, qui, huit ans plus tard, viendra à bout de son régime.

On connaît la suite : sur la base d’une fausse accusation de crime contre l’humanité, il sera jugé durant neuf ans à la CPI. Contre toute attente, il sera relaxé par cette institution. Rentré en Côte d’Ivoire, il a repris ses activités politiques dans sa recherche de vérité, qui passait pour lui par une nouvelle confrontation avec le Président Alassane Ouattara.

Laurent Gbagbo, ses actes forts au nom de la paix

Sauf que les institutions ivoiriennes vont le recaler pour éviter ce remake véridique qui aurait pourtant pu permettre de connaître le vrai vainqueur de l’élection présidentielle de 2010. La balise juridique sur son chemin, de la condamnation controversée à vingt ans de prison pour « un supposé braquage de la BCEAO », sera le salut de ses adversaires.

Chose curieuse, Alassane Ouattara, qu’il avait remis dans le jeu politique par un décret spécial, ne lèvera pas le petit doigt pour lui rendre la pareille. Qu’à cela ne tienne, Laurent Gbagbo a déposé sa candidature, espérant bénéficier d’une lecture favorable de son dossier par le Conseil constitutionnel, étant donné que le procès qui a abouti à sa condamnation n’avait pas respecté un certain nombre de principes dus aux personnalités de son rang d’ancien chef d’État.

Alassane Ouattara ingrat envers Gbagbo ?

La gouvernance de Laurent Gbagbo, de 2000 à 2010, avait été marquée par de longues séries de négociations avec les rebelles et leurs alliés, dont Alassane Ouattara, principal allié des reblles de Guillaume Soro devenus patrons dans l’armée sous sa gouvernance. Au tour de ce dernier à la tête de la Côte d’Ivoire, les négociations politiques seront quasiment éclipsées du tableau. Malgré les cris des opposants, la fermeté a été la ligne directrice du pouvoir RHDP, ce qui fait vivre les Ivoiriens dans une paix relative.

Et puis le Président Alassane Ouattara, qui a déjà fait quinze ans au pouvoir, est de nouveau en lice pour cinq années supplémentaires, sacrifiant ainsi sa fameuse demi-dizaine de jeunes leaders capables de gouverner le pays. Après les cinq ans déjà pris dans les cheveux par la fameuse nouvelle génération qu’il est seul à connaître, cinq autres années vont s’ajouter à leur âge, ce qui retirera le mot « jeune » à la « génération » supposée prendre sa suite après son quatrième mandat.

Laurent Gbagbo, farouchement opposé à ce quatrième mandat, qui, pour lui, n’est rien de plus qu’un « coup d’État civil », un « braquage », vient de refuser de mener le combat pour l’en empêcher. En lieu et place d’un discours guerrier attendu par ses adversaires, l’homme de 81 ans a pris de court ce petit monde des prévisionnistes, mais aussi ses partisans, en annonçant sa prochaine sortie de la vie politique.

Laurent Gbagbo « Je démissionnerai »

« Je démissionnerai au congrès. Je ne serai plus candidat à la direction du parti et puis je vais prendre mon temps pour moi-même, pour ma petite famille. […] Je vais vivre un peu, écrire… », a confié le président Laurent Gbagbo dans son interview accordée à Alain Foka pour AFO Media.

La première réaction est venue du RHDP, qui a semblé dérouté par la déclaration de Laurent Gbagbo. En réalité, le patron du PPA-CI fait là un sale coup à la réputation d’Alassane Ouattara, désormais seul vieux de la classe politique ivoirienne à lutter à 84 ans (en janvier prochain) pour se maintenir au pouvoir.

Cissé Bacongo se dechaine contre Laurent Gbagbo

Ce constat de gêne peut expliquer la sortie fracassante d’Ibrahim Cissé Bacongo. Le ministre ivoirien auprès du Président de la République chargé des Affaires politiques, par ailleurs secrétaire exécutif du RHDP a lancé :

« Il y en a un qui s’est réveillé aujourd’hui. Je crois que le réveil a été bon pour lui. Laurent Gbagbo dit qu’après cette élection, il met un terme à sa vie politique. Je dis alléluia, ça n’avait que trop duré. Depuis qu’il est arrivé sur la scène politique, la violence a commencé. En 1990, il a traité Houphouët-Boigny de voleur. Il disait qu’il avait plusieurs gouvernements qui pouvaient se succéder à la tête de ce pays. Il n’avait jamais dirigé un poulailler et il disait qu’il pouvait diriger la Côte d’Ivoire. Il a parlé et Dieu l’a mis à l’épreuve. En 2000, il lui a fallu seulement quelques semaines pour qu’il montre ses carences », dit cet homme politique âgé de 70 ans.

Et M. Cissé Bacongo de poursuivre en ajoutant : « En 2002, la Côte d’Ivoire a connu sa première rébellion. Ça veut dire qu’il a échoué. Il ne pouvait pas gagner, ce n’est pas possible. Lui, son nom rime avec la violence, physique comme verbale. Quand il dit qu’il va se retirer, on dit alléluia. Que Dieu soit loué. Et comme il ne changera jamais, il dit qu’il soutient les manifestations qui ont eu lieu ces jours-ci. Il y a eu deux morts, donc il est comptable de ces deux morts. Il dit que l’élection qui va avoir lieu le 25 octobre est un braquage. Cette élection se tiendra dans la fête. Laurent Gbagbo qui part à la retraite, pour nous, ça n’avait que trop tardé. »

Une réaction surprenante, puisque la déclaration de Laurent Gbagbo, malgré son soutien apporté aux manifestants contre le 4ᵉ mandat, participe à faire baisser les tensions dans le pays. Cissé Bacongo, dont le parti va tirer bénéfice de cette déclaration pour faire réélire son candidat sans grand problème, aurait dû la jouer fair-play, plutôt que de se lancer dans une diatribe inutile qui cache mal sa déception. C’est comme s’il souhaitait garder intactes les forces en présence, avec le risque d’explosion de la situation politique.