Drame à Nahio : Michel Gbagbo fustige un crime politique en Côte d’Ivoire
Après l’incendie meurtrier d’une rare violence de Nahio, ville bété d’Issia, Michel Gbagbo brise le silence et accuse le régime Ouattara d’avoir laissé se produire un nouveau drame d’État.
Drame de Nahio : ce que vous devez savoir
C’est le feu, le sang et des larmes à Nahio, localité du département d’Issia, dans le Haut-Sassandra. Le village a été attaqué et incendié après une manifestation organisée suite à l’appel du Front commun PDCI–PPA-CI, alliance de l’opposition ivoirienne, contre le 4ᵉ mandat d’Alassane Ouattara. Les jeunes de cette localité, opposés au scrutin présidentiel, ont saccagé des urnes et empêché le bon déroulement du scrutin dans certains bureaux de vote.
Alors que seule la gendarmerie est habilitée à apporter une réponse républicaine à ces actes, des individus, des miliciens, se sont engagés dans une expédition punitive contre les manifestants. Des groupes présentés comme proches du pouvoir RHDP, par des populations locales, ont blessé, tué des personnes et brûlé des maisons dans cette ville.
À ce stade des évènements, le procureur de la République, prompt à diffuser des communiqués pour traquer des militants de l’opposition auteurs de commentaires vexants contre les autorités, n’est toujours pas sorti de sa réserve, ce qui, pour les populations de Saïua, passe pour un blanc-seing accordé aux agresseurs.
Une expédition punitive meurtrière
Selon plusieurs témoignages recueillis par téléphone, des maisons ont été brûlées, une dizaine d’habitants ont été agressés et blessés, et deux personnes ont perdu la vie. Parmi les assaillants, des chasseurs traditionnels “dozos” et des jeunes partisans du parti présidentiel, bien identifiés par les populations, auraient participé à l’attaque nocturne.
Les otchoctones décrivent une scène de chaos total : cris, flammes et fuite dans la brousse. La ville de Nahio, où des maisons sont réduites en cendres, symbolise une fracture politique et ethnique que le pays peine à refermer.
La réaction de Michel Gbagbo : « C’est un crime »
Le Député Michel Gbagbo, enseignant à l’Université et fils de l’ancien président Laurent Gbagbo, a réagi avec force dans une tribune relayée sur les réseaux sociaux. Il y dénonce une dérive autoritaire et un climat de terreur d’État, voire une complicité ou une tolérance d’actes hautement criminels :
« Quand un chef d’État — illégitime — proclame œuvrer pour un rattrapage ethnique, quand il traite une partie de la population de “chiens”, quand des jeunes sont abattus par balle lors d’opérations de maintien de l’ordre, puis que des milices envahissent un village pour tuer et brûler, c’est un crime d’État. »
Le parlementaire fait référence au discours de clôture de campagne du Président Alassane Ouattara appelant ses partisans à la vigilance pour faire barrage aux « chiens » qui « pourraient passer ».
Michel Gbagbo compare la situation actuelle en Côte d’Ivoire à des précédents tragiques également passés sous silence :
« Après Bayota et Tehiri, c’est Nahio. Cette impunité rappelle dangereusement les prémices du génocide rwandais. Quand des civils deviennent des cibles, la République s’effondre. »
Une Côte d’Ivoire sous tension
Ce nouvel épisode de violence vient une nouvelle fois raviver les blessures de 2010-2011 et pose la question de la réconciliation nationale promise mais toujours inachevée. Dans l’Ouest du pays, les tensions intercommunautaires avaient fait de nombreux morts dans des villes et villages. Des crises sont encore mal résorbées, ce qui fait planer sur la Côte d’Ivoire du régime d’Alassane Ouattara un sentiment d’inégalités au sein des populations.
En quête de justice et de vérité
Michel Gbagbo conclut sa tribune sur un appel :
« Où en est la recherche de vérité sur le génocide du peuple Wè ? Quand la justice se taira, les peuples se souviendront. »
Le drame de Nahio s’inscrit lui aussi sur la longue liste des nombreux traumatismes des peuples de l’Ouest de la Côte d’Ivoire.