Talon veut quitter la scène, Yayi s’accroche aux projecteurs
Au Bénin, la séquence politique ouverte par la disqualification du parti Les Démocrates (LD) à la présidentielle de 2026 confirme un contraste désormais flagrant. Patrice Talon affiche la volonté de se retirer dans le calme et la continuité républicaine ; Boni Yayi, lui, s’enferme dans la contestation et les micros. Deux styles, deux fins de parcours : l’un choisit la sortie ordonnée, l’autre refuse d’abaisser le rideau.
Talon, le président qui prépare sa sortie
Dans son entretien du 4 novembre 2025, diffusé sur plusieurs chaînes nationales, le chef de l’État a surpris par sa sérénité. « Je suis malheureux que Les Démocrates ne puissent pas se présenter », a t’il déclaré avant d’insister sur le fait que « Nous devons arrêter cette guéguerre permanente ».
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Plus encore, Talon a laissé entendre que la fin de son mandat marquerait aussi la fin de sa carrière : il s’imagine “au village”, retrouvant une vie simple, loin du tumulte politique. Ce ton détaché résonne dans un pays où la population exprime sa fatigue des crises et des querelles : le président semble comprendre que les Béninois veulent passer à autre chose.
Yayi, la parole sans relai
À l’inverse, Boni Yayi continue de multiplier les prises de parole en dénonçant “l’exclusion” de son parti et une supposée “confiscation de la démocratie”. Ses interventions publiques contrastent avec la tempête interne qui secoue Les Démocrates.
Le retrait du parrainage de Michel Sodjinou, l’échec du duo Agbodjo-Lodjou, les recours rejetés, puis la démission de six députés ont révélé un parti fracturé. L’ancien secrétaire national aux élections Patrick Djivo a parlé d’auto-sabotage ; le député Midofi Antonin Hounga a reconnu un mauvais choix de candidat.
Dans ce climat, la rhétorique offensive de Boni Yayi sonne de plus en plus creuse : le chef du parti parle encore haut, mais ne mobilise plus. Beaucoup de ses anciens lieutenants ont quitté le navire, et la scène médiatique reste son dernier espace d’influence.
La posture présidentielle prend le dessus
En maintenant une communication mesurée, Talon se positionne non plus comme chef de camp, mais comme gardien de la stabilité institutionnelle. Son refus de s’accrocher au pouvoir, sa promesse de quitter la politique après 2026 et son appel à la démocratie sans affrontement répondent à une attente forte de la population : celle d’un pouvoir qui sait tourner la page, sans chercher la tension permanente.
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Là où Yayi entretient la tension, Talon la désamorce. Le président sortant sait que le véritable enjeu de 2026 n’est plus la victoire électorale, mais la manière de sortir du pouvoir sans crispation – un test de maturité démocratique pour le pays comme pour lui.
Et demain, un espace pour les anciens ?
Cette volonté d’apaisement ravive les discussions sur la création d’un Conseil des sages ou d’un organe consultatif où les anciens dirigeants pourraient siéger. Loin d’un Sénat politique, il s’agirait d’un cadre symbolique pour préserver la parole d’expérience tout en limitant son influence partisane.
Dans cette perspective, voir un jour Talon et Yayi côte à côte, non plus face aux caméras, mais autour d’une même table de réflexion, relèverait moins de l’utopie que d’une continuité institutionnelle assumée.
Un pays en quête de stabilité
Au fond, le duel entre Talon et Yayi illustre deux rapports au pouvoir : l’un tourné vers la sortie, l’autre prisonnier du retour. Les Béninois, eux, semblent avoir choisi : ils veulent de la stabilité, du sérieux et moins de spectacle. Talon l’a compris ; Yayi, pas encore.