Angélique Kidjo à Rio Loco : la Béninoise s’exprime

Festival des musiques du monde, Rio Loco a lieu chaque année depuis 1995 à Toulouse sur la Prairie des Filtres. Sa 30e édition se tient du mercredi 11 au dimanche 15 juin 2025 sur le thème « Supernova ». Et c’est bien sûr avec Angélique Kidjo. L’icône béninoise se confie.
« L’Afrique est le pont entre la France et le Brésil » : Angélique Kidjo au Rio Loco
Pour cette 30e édition de Rio Loco, Angélique Kidjo est au cœur de deux créations pour le festival, samedi et dimanche, à la Prairie des Filtres. Avant de se produire sur scène, la chanteuse d’origine béninoise s’est exprimée lors d’une interview exclusive.
Vous revenez à Rio Loco avec deux créations, dont une avec des enfants qui vont chanter certaines de vos chansons. Comment vivez-vous cette expérience ?
Avant de faire la Cité des Pitchouns à Toulouse pour Rio Loco, j’ai commencé par la Cité des Marmots à Paris ainsi que la Cité des Minots à Marseille. Ce qui est intéressant avec les enfants c’est qu’ils posent des questions naturellement même sur la vie privée mais sans aucune forme d’intrusion ou de malfaisance. C’est une curiosité qui leur permet aussi de se former. Et ce qui est fabuleux, c’est le fait qu’ils puissent chanter dans des langues qu’ils ne parlent pas. Ils apprennent tout phonétiquement et ils le font très bien.
Êtes-vous attachée à la transmission ?
Je suis un produit de la transmission. Nous sommes tous des produits de la transmission parce qu’il y a beaucoup de choses qui ne sont pas écrites, qui font partie de la connaissance, de l’humanité. Nos ancêtres n’avaient pas écrit beaucoup de choses. Pourtant des histoires ont été racontées au fil des siècles. Et moi, ce que j’aimais beaucoup quand j’étais gamine, c’était de poser des questions et de me faire raconter des histoires.
Vous avez aussi montré des engagements pour les droits des enfants, notamment en tant qu’ambassadrice de l’Unicef. Pourquoi ?
Vous vous rendez compte que c’est en 2002, quand j’ai été nommée ambassadrice de l’Unicef, qu’il y a eu la ratification des Droits des enfants. Comme si avant les enfants étaient des objets. Alors, j’ai ce rôle de guide. J’ai fait tellement de conférences sur ce sujet car c’est essentiel.
Dans votre deuxième création pour Rio Loco, vous êtes la passerelle entre la France et le Brésil. Est-ce reconnaître le rôle de l’Afrique ?
Mais l’Afrique est le berceau de l’humanité. C’est aussi simple que ça. Nous sommes des homo sapiens qui sont tous partis d’Afrique. Effectivement, entre la France et le Brésil, il y a l’Afrique. C’est un passage obligatoire. Pour moi, le pont a commencé par ma mère, dont les ancêtres sont des esclaves qui sont revenus de Salvador de Bahia. Le nom de jeune fille de maman était Fernando. Donc, j’ai grandi dans la culture créole des descendants brésiliens béninois. La première fois que je suis arrivée à Salvador de Bahia, en descendant de l’avion et je me suis dit, mais c’est chez moi ici, ça sent exactement comme chez moi.
Votre concert de dimanche, « Le Brésil au féminin pluriel », c’est l’exemple de la tolérance, de l’acceptation. C’est le message que vous voulez passer ?
C’est ce que je dis depuis que je suis née, depuis que je suis sur cette terre. C’est peut-être parce que j’ai grandi avec des parents qui étaient en avance de leur temps. J’ai été nourrie avec cette phrase, « un être humain n’est pas une question de couleur ». Mon père nous disait ça, ma mère nous disait ça. L’intelligence n’a ni couleur ni genre. J’ai toujours créé des ponts parce que mes parents l’ont toujours fait. Par la musique, je continue à dire aux gens qu’il y a des possibilités de dialogue partout.
Trouvez-vous dans le festival Rio Loco ces valeurs qui vous sont chères ?
Tout cela se passe à Toulouse ce qui ne m’étonne pas car c’est la ville de Nougaro qui prônait déjà ces valeurs. Il y a eu ici des Espagnols et beaucoup de cultures qui se sont rencontrées. Donc qu’un beau festival comme ça se déroule à Toulouse, ça tombe sous le sens. Chaque festival a son ADN, et l’ADN de Toulouse, c’est les rencontres, c’est de créer des ponts et d’inviter des gens de tous les horizons. Et c’est indispensable aujourd’hui, plus que jamais.